Dix âmes, pas plus de Ragnar Jónasson

En littérature noire, il y a des formules magiques qui font vendre un livre, ou tout du moins me font l’acheter presque à coup sûr. L’idée d’un huis-clos constitué d’une dizaine d’âmes habitant un village isolé d’Islande intègre cette notion de recette 100 % gagnante. Et c’est comme ça que je me suis retrouvée à lire mon premier polar nordique…

Dix âmes, pas plus de Ragna Jonasson (éditions La Martinière)

Dix âmes, pas plus de Ragna Jonasson (éditions La Martinière)

La littérature noire nordique a ses aficionados dont je ne fais clairement pas partie, étant naturellement plus attirée par les thrillers anglo-saxons ou francophones. Mais cette fois, le titre m’a interpelée car il y a cette promesse de huis-clos, confirmée par la lecture du résumé. Je n’ai pas réfléchi davantage avec de me lancer dans cette lecture, trop heureuse de tenir là l’occasion de découvrir ce genre même si c’est par le petit bout de la lorgnette. 

Malheureusement ce roman a confirmé en tout point les a priori que j’avais sur les polars nordiques, à savoir qu’ils reposent sur un rythme très lent, peu de rebondissements et une histoire qui passe en second plan. En gros, dans mon esprit, il ne se passe pas grand chose dans ces romans, on y vient surtout pour leur atmosphère. Hélas, mille fois hélas, ça n’est pas Ragnar Jónasson qui va me faire revoir mes préjugés puisque son roman coche absolument toutes ces cases. 

En gros, c’est l’histoire d’une nana qui quitte la capitale islandaise pour aller s’enterrer dans un trou. On y cherche un professeur pour enseigner aux deux seules élèves du coin. Etonnant… L’arrivée à Skálar n’est pas des plus chaleureuses, la compagnie se fait rare et ça n’est pas vraiment l’éclate tous les soirs avec les habitants du coin. Et puis, ce qui devait arriver, arriva. Nous voilà avec un mort sur les bras et pas de coupable mais seulement neuf suspects : tous les habitants de la commune. Enfin pour la dernière phrase, je l’ai tirée du résumé car je peux vous dire que je n’ai pas du tout senti que les choses tournaient ainsi pendant ma lecture. Et c’est bien là tout le problème…

Quand on résume ce bouquin, ça peut sembler assez passionnant, on s’attend à un vrai bon roman psychologique où chacun est suspecté et a des choses à cacher, pourquoi pas un roman choral qui passe en revue les motivations de chaque protagoniste. Il nous vient mille idées en tête pour en faire un véritable page-turner mais l’auteur a pris soin de s’en tenir le plus éloigné possible : à aucun moment l’histoire ne décolle, les personnages restent ternes du début à la fin, la mort passe totalement inaperçue et en réalité on ne cherche même pas à savoir si elle est réellement suspecte, on s’en fiche royalement ! Pire, il m’est arrivé de me demander en cours de lecture ce que l’on était censé en attendre de tout cela.

Elle était seule au monde. Et lorsqu’on est seul au monde, les concepts de culpabilité ou d’innocence n’ont plus vraiment de signification.

Evidemment j’ai débuté ce roman en repensant à Agatha Christie et à ses Dix petits nègres, renommé depuis Ils étaient dix. Je pense que chaque lecteur arrivé jusqu’à ce roman aura forcément eu cette grille de lecture en tête. Grosse erreur ! C’est justement à cause de cette attente totalement démesurée que la chute s’avère vertigineuse. En substance, je n’ai pas compris l’intérêt de nous pondre un tel roman quand un chef d’oeuvre de tous les temps peut être utilisé comme référence, c’est forcément un peu suicidaire ! Mais ça fait vendre…

Donc voilà pour moi un parfait exemple de roman très bien « marketé » ou maquillé si vous préférez. Mais une fois effeuillé, la réalité est nettement moins flatteuse et on finit par se sentir totalement dupé.

Maintenant, comme je n’ai pas envie de rester sur un échec, je serais ravie de recueillir vos conseils de lecture en matière de littérature noire nordique.



L’ESSENTIEL

Couverture GF de Dix âmes, pas plus de Ragnar Jonasson

Couverture GF de Dix âmes, pas plus de Ragnar Jonasson

Dix âmes, pas plus
Ragnar Jónasson
Editions La Martinière
Sorti le 14/01/2022 en GF 
352 pages 


Genre : polar nordique
Personnages : Una et les habitants de Skálar
Plaisir de lecture : ❤❤
Recommandation : non
Lectures complémentaires : les romans d’Agatha Christie, L’empereur blanc d’Armelle Carbonel, Le sang des Belasko de Chrystel Duchamp, Les refuges de Jérôme Loubry

 

RÉSUMÉ DE L’ÉDITEUR

Un mort.

Neuf suspects.

Recherche professeur au bout du mondeVoici une petite annonce qui découragerait toute personne saine d’esprit. Pas Una. La jeune femme quitte Reykjavík pour Skálar, l’un des villages les plus reculés d’Islande, qui ne compte que dix habitants. Malgré l’hostilité des villageois. Malgré l’isolement vertigineux.

Là-bas, Una entend des voix et le son fantomatique d’une berceuse. Et bientôt, une mort brutale survient. Quels secrets cache ce village ? Jusqu’où iront ses habitants pour les protéger ?


TOUJOURS PAS CONVAINCU ?

3 raisons de lire Dix âmes, pas plus

  1. Si vous êtes un inconditionnel de Ragnar Jónasson (éventuellement)
  2. Si vous êtes un fondu de littérature nordique (peut-être)
  3. Si vous n’avez plus rien à lire dans votre bibliothèque (et encore)

3 raisons de ne pas lire Dix âmes, pas plus

  1. Parce que c’est plutôt dénué d’intérêt
  2. Parce que c’est lent, c’est terne et sans vie
  3. Parce qu’il y a certainement mille fois mieux à découvrir dans ce genre
2 réponses
  1. Noneed
    Noneed dit :

    Je trouve le derniere paragraphe de cette critique assez lunaire. Ils étaient 10 de Agatha Christie est clairement un polar culte et extrêmement marquant par rapport a son caractère historique et novateur pour son époque on est bien d’accord.
    Néanmoins, sa qualité intrinsèque n’est pas nécessairement reconnue et s’il était sorti le meme jour que « 10 âmes pas plus » et écrit par un auteur au même type de renommée que Jonasson, il serait extremement biaisé de penser qu’il se démarquerait forcément. Je pense personnellement plutot l’inverse.

    Ajoutons également que le titre reflète parfaitement le contenu du roman qui est littéralement la spécialité de Jonasson depuis des années. Sans parler du fait qu’absolument personne n’emploie « ils étaient 10 » pour parler de 10 petits n***. Votre hypotèse marketing est vraiment tirée par les cheveux et embarassante.

    Vous n’avez pas aimé car vous n’aimez pas ce style et que vous n’aviez pas envie d’aimer ce livre, voila tout, pas la peine de pondre un recueil d’arguments loufoques pour essayer d’ajouter un peu de profondeur à cet avis.

    Répondre
    • Sandra
      Sandra dit :

      Que vous soyez mécontent à la lecture de mon avis, je l’entends. Mais ça reste mon avis et je l’argumente comme bon me semble. Il n’a pas plus de valeur que le vôtre mais pas moins non plus. Je vous rappelle tout de même que l’éditeur lui-même précise que Ragnar Jonasson est un « Grand lecteur d’Agatha Christie, il a aussi traduit la plupart de ses romans en islandais. » Donc mon parallèle ne me semble pas si stupide (ou « lunaire » si vous préférez) que cela. Quant à la stratégie marketing concernant le titre, je vous trouve bien naïf sur ce coup, mais c’est votre avis et contrairement à vous, je le respecte.

      P.S : si vous n’en êtes pas convaincu, je vous invite à faire une recherche sur Google en tapant « Dix âmes pas plus Agatha Christie », vous prendrez ainsi la mesure du nombre d’avis de lecteurs ayant fait le même parallèle que moi. Ca m’étonnerait que vous pensiez encore après cela que l’éditeur est le seul à ne pas y avoir pensé.

      Répondre

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *