Le Consentement de Vanessa Springora (version audio)

La version audio du Consentement de Vanessa Springora fait partie des 10 titres en compétition pour le Prix Audiolib 2021. Comme j’avais déjà lu ce texte pour le Grand prix des lectrices Elle 2020, je n’avais pas prévu de l’écouter en intégralité. Quelques passages suffiraient à me faire une idée de l’interprétation de Guila Clara Kessous, c’est en tout cas dans cet état d’esprit que j’ai démarré l’écoute du Consentement.

Le Consentement de Vanessa Springora (édition audio Audiolib)

Le Consentement de Vanessa Springora (édition audio Audiolib)

Je pense que j’en serais restée à cette première idée si la tonalité avait été en phase avec l’idée que je me faisais de ce texte oralisé. Je l’imaginais grave, posée, hésitante, meurtrie, tout sauf légèrement guillerette et insouciante. On parle tout de même d’agression sexuelle sur mineur de 15 ans par un homme beaucoup plus âgé, détenant le pouvoir que les gens de lettres et de la bonne société toute entière voulaient bien lui reconnaître. On parle d’une jeune fille sous emprise d’un vieux dégueulasse qui ne se contente pas de les aimer à peine pubères mais qui revendique le droit d’assouvir ses envies avec des enfants d’ici ou d’ailleurs, charmés ou payés, des enfants qui le remercient de leur transmettre ce qu’il sait de l’amour. Rien qu’en écrivant ces mots je sens la rage et le dégoût monter en moi.

A défaut d’une voix meurtrie, je m’attendais au moins à une voix qui laisse transparaître la colère, qui crie cette rage d’avoir été ainsi abusée à l’âge où l’on a encore droit de croire aux contes de fée ! Un âge où l’on peut se méprendre sur les intentions d’un adulte sans courir le risque d’en devenir la victime, où l’on peut se croire consentant sans que nos émois adolescents ne nous mènent dans son lit parce que l’on a en face de nous un adulte justement et qu’être adulte c’est savoir mettre les limites qu’un enfant n’est pas en mesure de poser lui-même. Non, V. du haut de ses 14 ans ne pouvait pas être consentante. Non, en aucun cas GM ne pouvait se méprendre sur ce point.

Pourquoi une adolescente de quatorze ans ne pourrait-elle aimer un monsieur de trente-six ans son aîné ? Cent fois, j’avais retourné cette question dans mon esprit. Sans voir qu’elle était mal posée, dès le départ. Ce n’est pas mon attirance à moi qu’il fallait interroger, mais la sienne.

Mais au bout d’un moment, j’ai fini par comprendre le parti pris de la narratrice. Tour à tour espiègle, insouciante et légère, sa voix ne fait que refléter l’état d’esprit qui est celui d’une gamine de 14 ans qui s’entiche d’un homme plus vieux que son père. L’absence de maturité se reflète dans cette voix et renforce l’idée qu’aucun doute ne pouvait être possible dans la tête de GM. Si Vanessa Springora livre son témoignage du haut de ses 40 ans, elle le fait avec transparence et courage, en montrant l’adolescente qu’elle était, sans s’épargner, en ne cachant pas son consentement de l’époque et même plus : ses sentiments amoureux à l’égard de Gabriel Matzneff. Son livre ne se focalise pas sur cette époque pseudo insouciante mais traverse le temps pour montrer les ravages d’une telle histoire sur sa vie. On la voit chapitre après chapitre se réveiller et prendre conscience de l’anormalité de la situation. Et au fur et à mesure de cette prise de conscience, la voix de Guila prend de l’épaisseur et de la gravité. De la maturité et de l’assurance et jamais elle ne se brise devant l’évocation de ce traumatisme qui finit par se révéler à V. Bien que profondément marquée par son histoire avec GM, Vanessa est une femme debout, bien décidée à reprendre sa vie en main et à faire entendre la voix des victimes de ce prédateur sexuel. Finalement, la narratrice avait le ton juste dès le départ pour accompagner l’évolution de celle qui fut une jeune fille victime avant de devenir une jeune femme combattante ou, du point de vue de Matzneff, celle qui fut une nymphette désirable avant de devenir une écrivaine redoutable qui a su prendre les armes pour combattre son bourreau sur son propre terrain.

En complément de cet avis sur la version audio, je vous invite à lire ma chronique sur ma première lecture du Consentement pour le Grand prix des lectrices Elle 2020.


Intéressé par le livre audio Le consentement ?

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L’ESSENTIEL

Couverture de Le Consentement de Vanessa Springora

Couverture de la version audio du Consentement de Vanessa Springora

Le Consentement
Vanessa SPRINGORA
Editions Grasset en GF, Le livre de poche et Audiolib en audio
Sorti en GF le 02/01/2020, le 06/01/2021 en poche et le 13/05/2020 en audio
207 pages (3h54 d’écoute)
Lu par Guila Clara Kessous

Genre : témoignage
Plaisir de lecture : ❤❤❤❤❤
Plaisir d’écoute : ❤❤❤❤❤
Personnages : V. et G.M
Recommandation : oui
Lectures complémentaires : La familia grande de Camille Kouchner, L’empreinte d’Alexandria Marzano-Lesnevich, Lolita de Valdimir Nabokov

 

RÉSUMÉ DE L’ÉDITEUR

« Depuis tant d’années, je tourne en rond dans ma cage, mes rêves sont peuplés de meurtre et de vengeance. Jusqu’au jour où la solution se présente enfin, là, sous mes yeux, comme une évidence : prendre le chasseur à son propre piège, l’enfermer dans un livre. »

Séduite à l’âge de quatorze ans par un célèbre écrivain quinquagénaire, Vanessa Springora dépeint, trois décennies plus tard, l’emprise que cet homme a exercée sur elle et la trace durable de cette relation tout au long de sa vie de femme. Au-delà de son histoire intime, elle questionne dans ce récit magnifique les dérives d’une époque et la complaisance d’un milieu littéraire aveuglé par le talent et la notoriété.

Un livre audio puissant porté par le lecture sensible de Guila Clara Kessous.


TOUJOURS PAS CONVAINCU ?

3 raisons de lire Le Consentement en version audio

  1. Parce que l’ombre et la peur doivent changer de camp
  2. Parce que les mots de Vanessa prennent encore plus de poids à travers la voix de Giula
  3. Parce que la parole de la victime doit avoir plus de répercussion que celle de son bourreau

3 AUTRES raisons de lire Le Consentement en version audio

  1. Parce qu’il es important de prendre la mesure des ravages que de tels agissements peuvent avoir sur la vie des victimes
  2. Parce que ce livre peut aider d’autres victimes à libérer leur parole
  3. Parce qu’il faut un courage exceptionnel pour livrer un tel témoignage et que cela mérite tout notre soutien
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