Honoré et moi de Titiou Lecoq

Fauché, ruiné, lessivé, dans la dèche, à poil le Balzac ! Qui aurait cru qu’un homme de son envergure, un écrivain de son talent, un personnage de sa notoriété ait vécu fauché comme les blés une grande partie de sa vie.

Honoré et moi de Titiou Lecoq (éditions L'iconoclaste)

Honoré et moi de Titiou Lecoq (éditions L’iconoclaste)

C’est pourtant ce que nous relate Titiou Lecoq dans sa biographie décalée du grand Balzac. Avec un franc-parler faisant souffler un vent de fraîcheur sur ce genre souvent poussiéreux, l’auteure nous conte un Balzac beaucoup moins conventionnel que nous pouvions l’imaginer en lisant le Père Goriot ou Eugénie Grandet au collège.

En réalité, celui qui aimait les lettres était sérieusement fâché avec les chiffres. Surtout avec les soustractions. L’argent qui entrait dans ses caisses était bien réel alors que celui qui en sortait devenait comme par magie virtuel. Et c’est ainsi que Balzac passera sa vie à ruser pour éviter ses créancier et contracter de nouvelles dettes auprès du tout Paris afin de s’offrir le niveau de vie qu’il convoitait. Ce rapport à l’argent a beaucoup influencé son œuvre, l’obligeant à écrire encore et toujours plus pour honorer des contrats auprès d’éditeurs et surtout percevoir des droits qui sont dépensés avant même d’être encaissés.

Ce qu’on raconte moins, que ce soit à l’heure de son enterrement ou pendant les cours de français, c’est que Balzac, ce n’est pas seulement le monument de la littérature française, le génie monstrueux qui dévorait gigots et cafetières, c’est aussi un type qui a tout raté. Il existe un Balzac intime, humain, fatigué, qu’on pourrait nommer le plus gros poissard de l’histoire littéraire.

Et c’est certainement là le principal enseignement de Balzac et moi : l’auteur le plus prolifique de son époque n’écrit pas tant par amour des lettres que par devoir et nécessité. Comme le souligne Titiou Lecoq à plusieurs reprises : Balzac n’aime pas l’art pour l’art, en vérité sa plume est un moyen comme un autre de gagner sa vie et  compte tenu de son talent, qui ne fait pas l’unanimité à l’époque, certes, il espère qu’elle le rendra aussi riche qu’il le mérite. Mais comme les choses ne se passent pas tout à fait comme il l’espère, il usera d’une mauvaise foi incroyable, d’une duperie à toutes épreuves, d’entourloupes savamment construites pour mettre en déroute ses créanciers, échapper à leurs huissiers et continuer encore et toujours à contracter des dettes auprès de ses amis, amantes et de sa pauvre mère.

Honoré de Balzac est un auteur que j’ai oublié depuis longtemps mais après avoir lu cette biographie savoureuse, je compte bien me replonger dans son œuvre en y cherchant ces références à l’argent et ces vies idéalisées qu’il aurait tant voulu faire sienne. Titiou Lecoq nous a rendu le personnage peut-être pas plus sympathique (sa pauvre mère a pris cher quand même) mais plus proche de nos préoccupations quotidiennes. On l’imagine sans peine fidèle client des commissions de surendettement s’il avait vécu à notre époque. Loin d’une biographie encyclopédique, l’angle choisi par l’auteure donne à voir un personnage bien plus complexe, humain et fascinant que j’aurais pu l’imaginer. L’une des plus belles découvertes du Grand prix des lectrices Elle 2020 à ce jour !

Honoré et moi est le document sélectionné par le jury de février du Grand prix des lectrices Elle 2020.


L’ESSENTIEL

Couverture de Honoré et moi de Titiou Lecoq

Couverture de Honoré et moi de Titiou Lecoq

Honoré et moi
Titiou LECOQ
Editions L’iconoclaste
Sorti en GF le 02/10/2019
304 pages

 

Genre : biographie
Plaisir de lecture : ❤❤❤❤❤
Personnages : Honoré de Balzac
Recommandation : oui
Lectures complémentaires :  La Comédie humaine de Balzac, évidemment !, L’autre Rimbaud de David Le Bailly

 

RÉSUMÉ DE L’EDITEUR

Parce qu’il était fauché, parce qu’il a couru après l’amour et l’argent, parce qu’il finissait toujours par craquer et s’acheter le beau manteau de ses rêves, parce qu’il refusait d’accepter que certains aient une vie facile et pas lui, parce que, avec La Comédie humaine, il a parlé de nous, j’aime passionnément Balzac.

Tout le monde connaît Balzac, mais bien souvent son nom reste associé aux bancs de l’école. Avec la drôlerie qu’on lui connaît, Titiou Lecoq décape le personnage. Elle en fait un homme d’aujourd’hui, obsédé par l’argent, le succès, l’amour, dans un monde où le paraître l’emporte sur le reste. Sous sa plume, ce géant de la littérature devient plus vivant que jamais. Titiou Lecoq est féministe, romancière et essayiste. Elle a notamment publié Libérées ! Le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale (Fayard, 2017; Le Livre de poche, 2019) et Les Morues (Au diable vauvert, 2011; Le Livre de poche, 2013). Elle collabore à plusieurs médias, dont Slate, et anime un blog, Girls and Geeks.


TOUJOURS PAS CONVAINCU ?

3 raisons de lire Honoré et moi

  1. Parce que c’est passionnant et ça se lit d’une traite
  2. Parce que ça vous donnera à coup sûr l’envie de (re)lire Balzac
  3. Parce qu’après cette lecture vous allez sacrément relativiser vos problèmes d’argent !

3 raisons de ne pas lire Honoré et moi

  1. Si vous êtes totalement et irrémédiablement fâché avec les biographies
  2. Si vous tenez toujours rigueur à ce pauvre Honoré de la lecture fastidieuse du Père Goriot en classe de 5e
  3. Si l’argent vous angoisse déjà assez comme ça pour ne pas lire l’histoire d’un mec qui a le chic pour se mettre dans une mouise d’enfer
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